L’air vif des Corbières, le village perché sur son plateau, un passé de bergeries, un trésor de sources et fontaines (le vieux puits, une merveille sous verre, au coeur du salon de l’Auberge !), de proches vignobles au fier caractère…
par Jacques Gantié
En ouverture : Gilles Goujon, seigneur de Fontjoncouse
La salle de restaurant (photo F. Ducasse)AuthenticitéÀ vingt minutes de Narbonne, la maison de Marie-Christine et Gilles Goujon vit, respire et puise sa force dans un pays de bravoure. L’avenue Saint-Victor ? La rue principale ! Le restaurant ? Ni ors ni manières, mais un rustique chic contemporain, sièges de cuir rouge et convivialité pour une clientèle souvent “du cru”. Un capital confiance.
Bon sensDepuis la troisième étoile (2010), Gilles Goujon fait sans doute accourir les amateurs de bien d’autres contrées que ce Midi de solides appétits, mais il reste aubergiste. Sagesse ! Gastronomie attentive au terroir et à ses richesses par cet ancien de Vergé, Passédat, Meneau et Gérard Clor. Bon sens populaire et mémoire intacte des débuts difficiles quand le client était rare sur cette hauteur, révélée dans les années 80 par un autre sacré cuisinier, David Moreno.
Si l’oeuf de poule Carrus “pourri” de truffes, purée de champignons et truffes et briochine tiède, subtil et rustique, ou la “bullinada”, comme un retour sur Carry-le-Rouet, plat de tempérament façon bouillabaisse avec filet de rouget barbet, pomme fourrée d’une brandade à la cébette, écume de rouille au safran, désertaient la carte, il y aurait pancartes et calicots d’insurrection dans les rues de Perpignan, Narbonne et Carcassonne ! Donc, plats collectors ! Et bien d’autres assiettes champêtres ou canailles, habilement mises en scène comme les champignons d’automne sur décor de sous-bois ou un délicat suprême de palombe cuit à l’os, figues de Corbières et tartine de béatilles, sans oublier le lièvre à la royale, filet et cuisse juste rôtis et rosés, plat fin et puissant en deux visions. Enfin, comme une douceur de potager avec la carotte confite sur un sablé de noisettes du Piémont, sorbet menthe et livèche, réduction de jus de carotte. Une gastronomie précise, dépourvue d’arrogance, qui terroirise à propos, joviale, de haute campagne.
Terroirs? Ceux du Midi, de Corbières en Coteaux du Languedoc et Côtes du Roussillon, Faugères, Minervois, Banyuls ou Saint-Chinian, sont en force sur une carte qui joue franc jeu le parti des vins du soleil. Le tout est “haute cuisine cousue main”, bien dans son lieu, avec chambres accueillantes autour de la piscine et annexe dans une proche maison de village dont chacune porte le nom d’un chef - Chapel, Bocuse, Maximin, Troisgros… - avec vestes signées et encadrées !
La “bullinada”
Suprême de palombe aux figues des Corbières
Automnale de champignons
La chambre Maximin
Vingt ans et une fêteIl y a un an, Marie-Christine et Gilles Goujon fêtaient les vingt ans de l’Auberge. 60 chefs et 100 étoiles rassemblés à Fontjoncouse ! Comme un avant-goût des 25 ans du Louis XV d’Alain Ducasse, à Monaco, mais sur l’air de la fête au village avec marché aux producteurs locaux, fanfare et flonflons, sosie de Johnny, dîner de gala, nuit sans fin, dégustation de grands crus !
L’Auberge du Vieux Puits est ainsi moins un 3 étoiles solitaire qu’une table “nature” et haut de gamme qui rallie et réchauffe, avec MOF à la manoeuvre et épouse biterroise à l’accueil pétillant. Gilles Goujon (natif de Bourges !) est même adjoint au maire et sans conteste le premier ambassadeur de cette communauté audoise de 130 habitants sans qui Fontjoncouse serait inconnu au bataillon des lieux gourmands.
• Auberge du Vieux Puits
5, avenue Saint-Victor
11360 Fontjoncouse
Tél. (0)4 68 44 07 37http://www.aubergeduvieuxpuits.frMenus 70€ à midi en semaine, 135€ et 160€
Fermeture hebdomadaire lundi et mardi. Fermé du 2 janvier au 11 mars 2013
8 chambres à l’Auberge, 6 chambres à “La Maison des chefs”, à 300 mètres(photos Jacques Gantié et X)10 décembre 2012